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Axes thématiques des contributions
Coordination du dossier thématique
Contacts et soumission d'article
« Système alimentaire urbain et santé en Afrique »
« Urban food system and health in Africa »
Sous la Coordination de :
Pr Dominique MEVA’A ABOMO (HDR), Pr Parisse AKOUANGO, Dr Parfait MATOUTY
Date limite de soumission : 31 mars 2020 ; Parution du Numéro : 30 juin 2020
L’insécurité alimentaire constitue l’une des plus grandes peurs mondiales au 21ème siècle. D’après la FAO (2019), plus de 2 milliards de personnes sont en situa-tion d’insécurité alimentaire et plus de 80 millions souffrent de la faim dans le monde. La famine constitue dès lors une véritable pandémie. La même source signale que l’Afrique est le continent où les populations (20 %) souffrent le plus de la faim dans le monde. Sur les 41 pays qui ont besoin d’une aide alimentaire dans le monde, 75,60 % se trouvent en Afrique, soit 31 pays . Autrement dit, plus de la moi-tié des pays (57,40 %) du continent ont besoin de l’aide alimentaire. Cinq pays afri-cains connaissent une insécurité alimentaire sévère ou aigüe (la République dé-mocratique du Congo, l'Ethiopie, le Soudan, le Soudan du Sud et le Nigeria). Ces cinq pays comptent 40 millions de personnes sur les 113 millions concernées dans le monde, soit 33,39 % . Une augmentation significative des pays ayant besoin d’une aide alimentaire est observée depuis 2009 dans le continent, soit plus de 10 pays en 10 ans (FAO, SIMAR, 2019). Dans l’ensemble, 88,76 % de personnes ayant besoin d’une aide alimentaire dans le continent souffrent d’une sous-nutrition chronique, soit 237 millions d’individus sur 256,5 millions de personnes souffrant de la faim (soit, environ 20 % de la population du continent). Entre autres, 59 millions d’enfants de moins de 5 ans souffrent d’un retard de croissance, soit environ 30,33 %. 9,7 millions (5%) d’enfants de cette même tranche d’âge sont victimes d’une surcharge pon-dérale, et 13,8 millions (7,1%) souffrent d’une insuffisance pondérale. L’obésité est observée quant à elle chez 11.8% de la population. L’insalubrité alimentaire ren-force ce profil de l’insécurité alimentaire de l’Afrique avec une quasi-endémicité de plusieurs maladies d’hygiènes alimentaires (à l’exemple de la typhoïde, la dysenterie, le choléra, les diarrhées…), marquée par des poussées épidémiologiques à forte fréquence. En définitive, la situation reste alarmante en dépit des multiples actions de lutte contre la malnutrition, et la sous-alimentation dans le continent.
Cette situation est révélatrice d’un profond dysfonctionnement des sys-tèmes alimentaires. D’après, Malassis L. (1979), fondateur de l’économie agroali-mentaire, un Système Alimentaire désigne la manière dont les hommes s’organisent, dans l’espace et dans le temps, pour obtenir et consommer leur nour-riture. Il renvoie d’après Alid (2011), à l’ensemble des activités urbaines et périur-baines de production, d’échange, de transformation, de distribution et de con-sommation soumis à des évolutions sans précédent qui concernent différentes parties prenantes : l’industrie agroalimentaire, les consommateurs urbains et les pouvoirs publics. Il s’assimile, au sens de Fournier et Touzard (2014), à un ensemble de relations entre les activités urbaines et rurales, les flux (physiques, économiques, informationnels), les institutions et les connaissances qui contribuent à nourrir une population urbaine. Et pour Meva’a Abomo, Makita Njoh et al., (2019), le système alimentaire est un ensemble des dispositifs et dispositions, des mécanismes et pro-cessus, autant structurels que fonctionnels en interdépendance, qui intègrent les enjeux sanitaire et de durabilité, en matière de production, de transport, de trans-formation, de distribution et de consommation des produits alimentaires.
Toutes ces approches de perception sont révélatrices de la difficulté à cir-conscrire et à maîtriser le système alimentaire, ainsi que sa gouvernance dont l’enjeu est la sécurité alimentaire. D’après Meva’a Abomo, Akamba Mvomo et al., (2019) la sécurité alimentaire désigne la capacité à garantir durablement un ni-veau de satisfaction acceptable des besoins alimentaires de toutes les couches de la population au sein d’une communauté donnée, en quantité et en qualité d’une part, puis en tout temps et en tout lieu de son cadre de vie d’autre part, afin de promouvoir le bien-être de cette communauté et son développement du-rable. Pour le comité de Sécurité Alimentaire Mondiale (2013) la sécurité alimen-taire existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment la possibilité physique, sociale et économique de se procurer une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins et préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. La sécurité alimentaire est en définitive le produit d’un type de gouvernance du système alimentaire. A l’inverse, l’insécurité alimentaire résulte des dysfonctionnements de la gouvernance d’un système alimentaire qui se veut transversale et qui implique tous les acteurs.
Des inégalités géographiques de l’ampleur de l’insécurité alimentaire sont observées entre les pays africains d’une part, puis entre les espaces urbains et ru-raux à l’intérieur d’un même pays. Les espaces urbains sont des lieux de prédilec-tion de cette insécurité vue la croissance rapide de la population urbaine, et donc, de la demande alimentaire dans un contexte de pauvreté. Cette expansion sociodémographique est le produit de deux dynamiques agissant en synergie : la forte croissance naturelle urbaine et la migration urbaine (Meva’a Abomo, 2019 ; Etoa Ndende, 2018 ; Babacar Ndione, 2014 ; Vimard, Fassassi, 2011 ; Zamwangana Tungu, 2003). Ces dynamiques sont à l’origine de l’évolution rapide des taux d’urbanisation de toutes les sous régions du continent . D’une manière générale, le taux d’urbanisation du continent qui était de 26,7 % en 1980 est passé à 40,4 % en 2015 ; il est projeté à 55,9 % en 2050 (Nations Unies, 2016). D’après la même source, plusieurs pays du continent se particulari-saient déjà, en 2015, avec des taux d’urbanisation davantage inquiétants à l’exemple du Gabon (87,2 %), de la Lybie (78,6 %), de Djibouti (77,3 %), de l’Algérie (70,7 %)… Autant certains pays sont de véritables Etats-Urbains en devenir, autant l’Afrique elle-même est un continent-urbain en devenir. Si la certitude de ce de-venir est indéniable, l’épanouissement et le bien-être des citadins de ce continent urbain, quant à eux, sont d’ores et déjà compromis et incertains, au regard de la profonde anarchie qui caractérise le développement du fait urbain en Afrique.
Cette incertitude est liée à plusieurs facteurs. La multiplication rapide des espaces urbains, par exemple, reste jusqu’ici sous-évaluée, sous-estimée et non contrôlée. Elle est entretenue par deux logiques. La première est la logique de création institutionnelle ou politico-administrative des villes. Des agglomérations rurales sont institutionnellement transformées en villes sans une quelconque planifi-cation au préalable, par la force du Décret et pour des raisons très souvent poli-tiques. La seconde est la logique de création endogène où les populations elles-mêmes, à force de rendre un lieu attractif et florissant finissent par s’y agglomérer. L’initiative populaire précède donc la légitimation institutionnelle dans ce cas de figure. Ces deux logiques ont fécondé plusieurs centaines de villes. Les recense-ments des espaces urbains du continent qui s’articulent très souvent sur les agglo-mérations de plus de 300 000 habitants dans un contexte où plus de 97 % de villes ont entre 10 000 et 300 000 habitants, fait état de 225 villes reconnues internationa-lement, au lieu de 7 500 répertoriées par Africapolis , une base de données géo-spatiales. La non-maîtrise de cette augmentation rapide et anarchique de l’armature continentale de villes s’accompagne d’une non maîtrise de la crois-sance également rapide et anarchique de l’armature sociodémographique des-dites villes conformément aux taux d’urbanisation évoqués plus haut. Quel que soit la logique de création, la ville africaine souffre d’un profond problème de maîtrise de son développement multiscalaire. Ce problème est entretenu par plusieurs dé-terminants à l’exemple de la crise de planification et l’insuffisance de capacités urbaines dans tous les domaines. D’une manière générale, l’occupation et la mise en valeur de l’espace précède la planification urbaine dans tous les domaines structurant l’appareil urbain. Puis, l’offre urbaine à faible dynamique d’amélioration quantitative et qualitative, est largement inférieure à une forte demande urbaine en perpétuelle augmentation dans tous les domaines (soins de santé, eau potable, logement, transport public…).
La sécurité alimentaire constitue aussi l’un des secteurs en proie à cette ina-déquation entre l’offre et la demande urbaine en Afrique. Cette situation est un produit des dysfonctionnements des systèmes alimentaires urbains en crise de pla-nification et de gouvernance (Akouango, 2018). Elle contraste totalement avec les multiples poten-tialités et atouts tant agraires qu’humains dont regorge ce continent (Akouango, 2017). D’après Jac-quemot (2017) et Dounia Ben Mohamed (2015), l’Afrique dispose de près de 60 % de terres cultivables de la planète et le rapport des Nations Unies (2016) souligne que sa population est la plus jeune du monde. Ce contraste amène, d’une part, à questionner la technostructure en charge de la planification et de la gouvernance des systèmes alimentaires, puis, la socio-structure constituée de l’ensemble des acteurs et des dynamiques d’acteurs se développant dans les secteurs de la pro-duction agraire, le transport, la transformation, la distribution, la consommation… de chaque système alimentaire urbain.
Le contraste ci-dessus amène, d’autre part, à questionner les répercussions de cette situation alimentaire sur la santé et le développement en Afrique.
Le présent Dossier Thématique de la Revue Espace, Territoires, Sociétés et Santé (RETSSA) ouvre un débat scientifique autour de ce double questionnement. L’objectif ici est de décrypter les systèmes alimentaires urbains afin de com-prendre et d’expliquer leur dysfonctionnement, ainsi que leur interaction avec la santé ; puis, de simuler les scénarii de régulations possibles de la situation. Ce Dos-sier Thématique participe de la volonté de la RETSSA à contribuer, à partir du levier scientifique, à l’amélioration des cadres programmatiques et au renforcement des capacités de gouvernance des systèmes alimentaires urbains en Afrique. L’enjeu ici est la réduction substantielle et durable de l’insécurité alimentaire urbaine ainsi que les répercussions socio-sanitaires associées pour un développement durable des villes africaines.
Axes thématiques des contributions
Les propositions de contribution attendues dans ce Dossier Thématique sont de deux ordres : les réflexions épistémologiques ou théoriques, puis, les résultats des études empiriques portant sur six principaux axes thématiques :
Axe thématique 1 : Réflexions épistémologiques et théoriques
Cet axe thématique s’articule sur des réflexions épistémologiques et théo-riques innovantes sur les systèmes alimentaires urbains, la sécurité alimentaire, la sécurité sanitaire des aliments, la souveraineté alimentaire, l’analyse des chaines de valeur alimentaire, la cartographie des chaines de valeur alimentaire, le conti-nuum urbain-rural des systèmes alimentaires, la métropolisation de la sécurité ali-mentaire, l’interaction système alimentaire urbain et santé, etc., en s’appuyant sur les expériences africaines.
Axe thématique 2 : Dressage des Profils des systèmes alimentaires urbains de l’Afrique
Cet axe thématique se penche sur la caractérisation des systèmes alimen-taires urbains de l’Afrique en mettant l’accent sur les cadres politico-institutionnel, législatif et juridico-règlementaire, sur la caractérisation structurelle des systèmes alimentaires urbains, la relation de causalité structurelle entre lesdits systèmes et la santé. Cet axe s’ouvre précisément aux contributions portant sur les pratiques de gouvernance, sur les dynamiques d’acteurs des composantes structurelles desdits systèmes (la production, le transport, la transformation, la distribution et la con-sommation des produits alimentaires) en établissant le lien avec le risque sanitaire. Les contributions se penchant sur l’analyse du continuum urbain-rural des systèmes alimentaires et de la métropolisation de la sécurité alimentaire en rapport avec la santé sont encouragées. L’axe conduit, en définitive, au profilage des systèmes alimentaires urbains du continent d’une part, et des interactions entre lesdits sys-tèmes et la santé d’autre part.
Axe thématique 3 : Crise de sécurité alimentaire et répercussions sur la santé et le bien-être
La crise de sécurité alimentaire urbaine renvoie à l’insécurité alimentaire ur-baine. Elle désigne l’incapacité à garantir durablement un niveau de satisfaction acceptable des besoins alimentaires de toutes les couches de la population ur-baine, en quantité et en qualité tant nutritive que sanitaire d’une part, puis de ma-nière permanente (en tout temps) et en tout lieu de l’espace urbain d’autre part, afin de promouvoir l’épanouissement desdites populations et le développement urbain durable. Cet axe thématique analyse cette crise à partir des expériences empiriques suivant trois entrées : les déterminants, la caractérisation et les réper-cussions. Les déterminants renvoient aux causes politiques, économiques, sociales, culturelles et écologiques de la crise. La caractérisation porte sur le décryptage des problèmes d’approvisionnement et d’accessibilité physique aux aliments, l’analyse des ques-tions relatives aux risques d’hygiène alimentaire ou plus globalement au risque de santé alimentaire ; aux questions relatives à la temporalisation et/ou à la saisonnali-té de l’accès aux aliments et au risque sanitaire associé,… Enfin, l’analyse des ré-percussions portent sur le profilage des faciès épidémiologiques des maladies liées à l’alimentation. Elle explore également les impacts économiques, sociaux et cul-turels de la crise de sécurité alimentaire. Cette troisième entrée décrypte plus glo-balement l’incidence de la crise de sécurité alimentaire sur le bien-être. Les con-tributions abordant le continuum urbain/rural de cette incidence et les analyses prédictives sont encouragées.
Axe thématique 4 : La question du genre dans les systèmes alimentaires urbains
Cet axe traite de la place de la femme dans le système alimentaire urbain. Il est question de décrypter et d’analyser son implication dans la gouvernance des systèmes alimentaires d’une part, puis dans chaque composante structurelle dudit système : la production, le transport, la transformation, la distribution et la consommation d’autre part . Un intérêt particulier est accordé à l’analyse du vécu de la femme en insistant sur des expériences empiriques de discriminations, abus et violation de droits éventuels. Des études comparatives de vécu hommes / femmes sont en-couragés.
Axe thématique 5 : Vers des systèmes alimentaires urbains durables en Afrique
Cet axe thématique se penche sur les solutions à apporter aux dysfonction-nements des systèmes alimentaires urbains d’Afrique, et à la crise de sécurité ali-mentaire urbaine associée. La réflexion est orientée sur ce qu’il faut concrètement faire pour promouvoir les systèmes alimentaires urbains durables. Un intérêt parti-culier est accordé aux contributions abordant les questions de changement clima-tique en rapport avec les systèmes alimentaires et aux contributions qui proposent des mesures d’adaptation appropriées à des contextes empiriques précis.
Axe thématique 6 :Varia
Chaque Numéro de la RETSSA contient une rubrique varia. Ce dernier axe thématique s’inscrit dans cette tradition. Il s’ouvre donc à diverses contributions qui ne sont pas forcément en lien avec la thématique traitée dans ce Dossier (voir les différentes rubriques de la revue RETSSA : www.retssa-ci.com).
Les contributions doivent se conformer aux normes éditoriales de la RETSSA .
Les consignes de la revue pour soumettre un article est consultable ici :
http://www.retssa-ci.com/index.php?page=auxauteurs
Coordination du dossier thématique
Ce Dossier Thématique est coordonné par :
- Pr Dominique MEVA’A ABOMO (HDR) , Société Savante Cheikh Anta Diop (SS-CAD), FLSH-Université de Douala (Cameroun), E-mail : mevaa_abomo@ss-cad.org
- Pr Parisse AKOUANGO , Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie et de Foresterie, Université Marien N’Gouabi (Congo-Brazzaville), E-mail : parakouango@yahoo.fr
- Dr Parfait MATOUTY , Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie et de Foresterie, Université Marien N’Gouabi (Congo-Brazzaville), E-mail : par-fait.matouty@gmail.com
Contacts et soumissions d'articles
Les propositions d’articles complets sont à envoyer au secrétariat permanent de la revue ( rev.tssa@gmail.com ) contre un accusé de réception.
Pour vos contributions et questions, veuillez contacter les responsables du Dossier Thématique ci-dessus.
Villes, activités économiques et santé en Afrique
Numéro spécial VARIA
Méthodes et outils géospatiaux dans l’analyse des problèmes de santé
Mobilité, transports et santé en Afrique
Mutations environnementales et risques sanitaires en Afrique
Santé maternelle, néonatale et infantile en Afrique: Analyse de la situation et perspectives
Système alimentaire urbain et santé en Afrique
Education, santé et bien-être en Afrique
Migration et santé en Afrique subsaharienne
La santé dans le monde rural
Dynamiques spatiales, sociales, territoriales et santé en milieu urbain
11 ème numéro Juin 2023
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